Marcher sur les traces du patrimoine rural en Vaunage : itinéraires et gestes d’attention

10/06/2025

Un patrimoine rural singulier : la Vaunage au fil des siècles

Entre le Gardon, le Rhône et les derniers reliefs des Cévennes, la Vaunage a longtemps été un grenier, un lieu de transhumance, de cultures céréalières puis de vignoble. La structure parcellaires, les réseaux d’irrigation, les sentiers empierrés et les fameuses “capitelles” (cabanes de pierre sèche) sont les vestiges les plus immédiatement visibles de ce labeur rural. À l’écart des grands axes urbains mais au cœur des échanges antiques, ce territoire a su, jusqu’au XX siècle, préserver ses traditions agricoles et pastorales.

  • Plus de 450 km de chemins ruraux sont encore praticables en Vaunage (source : Communauté de Communes de la Vaunage).
  • Environ 1 500 capitelles recensées sur l’ensemble de la Vaunage, dont certaines datent du XVIII siècle (Source : DRAC Occitanie).
  • Le patrimoine rural de la Vaunage est classé à l’Inventaire du patrimoine culturel immatériel par le Ministère de la Culture depuis 2019.

Tout cela façonne une esthétique originale et offre une formidable matière à qui veut marcher “en conscience”, pour comprendre ce qui a modelé la vie locale.

Randonnée n°1 : Le chemin des meurgers et capitelles au départ de Calvisson

Calvisson est l’un des villages où les reliefs de la garrigue concentrent le plus de vestiges d’architecture rurale en pierre sèche. Au nord du village, le circuit balisé des “capitelles” s’étire sur environ 8 km.

  • Accès : Départ recommandé depuis le parking du foyer communal, suivre le balisage jaune. Réalisable toute l’année, avec plus d’ombre entre novembre et mai. Prévoir de l’eau, surtout en saison chaude.
  • Patrimoine rencontré :
    • Capitelles restaurées et en ruine (répertoriées par la commune, voir le plan en mairie).
    • Murets appelés “meurgers” (amas de pierres issus du dépierrage des champs, parfois sur plus d’un kilomètre).
    • Restanques (terrasses agricoles permettant la culture sur les pentes, art du XVII au XIX siècle).
    • Sources captées, puits, et ruines de petits abris pastoraux.

L’attention à porter : certains murs effondrés abritent aujourd’hui lézards occellés, orvets et microfaune inscrite en protection régionale. Il est donc nécessaire de ne pas déplacer les pierres et d’éviter toute cueillette.

Randonnée n°2 : Sur les drailles de la transhumance, entre Congénies et Aubais

Les drailles, ces chemins pastoraux balisés depuis le Moyen Âge, permettaient aux troupeaux de traverser la Vaunage lors des grandes transhumances. La boucle Congénies-Aubais (10 km, balisage blanc-rouge du GR 653) suit en partie l’ancien tracé des bergers.

  • Accès : Départ place de la mairie de Congénies, retour possible par les chemins de vignes vers Aubais.
  • Patrimoine rural à observer :
    • Vestiges de ponts à dos d’âne sur les ruisseaux et anciens abreuvoirs.
    • “Clapiers” (tas de pierres pour clôturer les drailles, appelés aussi “mascla” localement).
    • Franges de vignes plantées de grenache et carignan (cépages installés entre 1870 et 1920).
    • Magnifiques alignements de mûriers, témoins de la sériciculture jusqu’à la crise du ver à soie (fin XIX).

Les chemins, parfois enherbés, sont propices à l’écoute de la huppe fasciée dès avril, et abritent des orchidées sauvages protégées, comme Ophrys apifera ou Serapias lingua (source : Association Gard Nature).

Randonnée n°3 : De Nages à Caveirac, en longeant les “mazets” viticoles

La ligne de collines des Costières, entre Nages et Caveirac, est jalonnée par de nombreux “mazets”, ces petites maisons de vigne qui servaient d’abri saisonnier aux vignerons. Ce parcours de 12km suit d’anciennes routes de charrettes et traverse les principales zones de vigne de la Vaunage.

  • Accès : Départ possible depuis l’arrêt de Bus de Nages, parking à proximité. Suivre le balisage PR local.
  • À découvrir :
    • Mazets privés (visibles depuis la route), souvent accompagnés d’un puits ou d’un “paradou” (ancien jardin potager clos).
    • Vieille croix de chemin du XIX, témoignant des processions rurales et des rituels agricoles.
    • Quelques parcelles anciennes en polyculture : oliviers, figuiers, céréales et ruchers en pierre.

Les “mazets” sont devenus emblématiques du paysage rural de la région nîmoise et vaunageolle, et font parfois l’objet de tentatives de restauration. Il est recommandé de ne pas pénétrer dans les propriétés privées, même en ruine.

Écouter et voir : gestes et précautions en marchant

La fréquentation croissante des chemins de la Vaunage rend l’attention au patrimoine collectif indispensable. Ces éléments, souvent modestes, sont vulnérables (érosion, effondrement, prélèvement illégal de pierres ou de faune).

  • Restez sur les sentiers balisés pour limiter le piétinement latéral.
  • Ne soulevez jamais les pierres des murets : elles abritent arthropodes, reptiles et parfois chauves-souris.
  • Les mousses et lichens fixés sur les pierres sont protégés et constituent de vieux micro-habitats.
  • Laissez capitelles et abris intacts, même lorsqu’ils semblent accessibles : souvent fragilisés, leur accès aggrave leur effondrement.
  • Privilégiez la visite hors flux touristiques (semaine ou début de matinée).

Outils pour aller plus loin : cartes, ouvrages et initiatives locales

  • Cartographie : Le portail IGN répertorie les chemins ruraux de la région ; la carte IGN série 1:25000 “Sommières – Nîmes” couvre toute la Vaunage.
  • Lectures conseillées :
    • Le Patrimoine de la pierre sèche en Vaunage”, DRAC Occitanie, 2021.
    • Balades secrètes en Vaunage”, collectif d’associations locales, 2019.
  • Initiatives à soutenir :
    • L’association “Les Pierres Sauvages de la Vaunage” propose régulièrement des chantiers de restauration participatifs de murets (adresse : mairie de Villevieille pour infos).
    • Programmation de sorties “patrimoine rural” par Le CPIE du Gard : cpie-gard.fr.

Pour une immersion respectueuse et consciente

Marcher dans la vallée de la Vaunage, c’est s’accorder à la simplicité du paysage, entrer en dialogue avec les témoins du passé agricole, et comprendre que rien de cela n’est tout à fait immobile. À chaque pas sur ces sentiers ruraux, une histoire se dévoile : celle de la résistance des pierres sèches, celle des chemins funambules entre passé et présent, celle de la biodiversité qui renaît dans les interstices des anciens abris. Randonner ici, c’est accepter de ralentir et de participer à la préservation de ce tissu modeste mais essentiel.

D’autres boucles et variantes existent, à adapter selon la saison, la météo et la capacité du groupe : n’hésitez pas à consulter les associations locales ou les bornes d’information installées à l’entrée des villages. Ce patrimoine rural est fait pour durer, mais il a besoin de l’attention de chacun. Un territoire vivant se découvre à petits pas.

Pour toute question sur la planification, l’état des sentiers ou la lecture du paysage rural, des guides naturalistes locaux proposent régulièrement des sorties commentées : renseignez-vous en mairie ou auprès de la Maison du patrimoine vaunageol.

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